Les Sentiers de l’imaginaire : « La Commune de Paris à hauteur d’homme »

Une critique du tome 1 de la bande dessinée de Raphaël Meyssan sur la Commune de Paris, le 8 décembre 2017

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Un chef d’œuvre !

Diplômé en sciences politiques, Raphaël Meyssan travaille comme graphiste lorsqu’il conçoit l’idée un peu folle de réaliser un album de bande-dessinée relatant la Commune en n’utilisant que les gravures d’époques...

Apprenant par hasard qu’un communard a vécu dans l’immeuble où il loge, l’auteur va se lance dans une enquête minutieuse, compulsant de nombreuses archives pour exhumer un passé oublié et faire revivre, l’espace d’une série, la Commune de Paris...

Étrangement, malgré l’utilisation de gravures contemporaines à la Commune pour illustrer son récit, l’album évite subtilement l’écueil professoral en exposant les faits qui ont conduit à l’établissement de la Commune de Paris, sujet de ce premier tome. Au contraire, en prenant comme fil rouge le destin de deux personnages, un homme et une femme, qui ont été emporté par le vent de l’histoire, l’auteur donne à voir ces événements à hauteur d’homme... L’enchaînement des événements y est bien évidemment fidèlement retranscrit, permettant au lecteur d’en comprendre les tenants et les aboutissants, mais c’est la dimension tragiquement humaine de ces Damnés de la Commune qui captivent le lecteur...

Car, alors les recherches de l’auteur sur Lavalette, son voisin communard, ont au départ difficilement progressé, l’auteur a exhumer un autre fantôme du passé, une certaines Victorine B. dont il est fait mention dans un document particulièrement poignant et dont il retrouvera le témoignage dans une biographie au titre tragique : Victorine B. Souvenir d’une morte vivante. Elle sera avec Lavalette le fil rouge de son histoire de la Commune, une façon subtile de faire revivre cette parenthèse révolutionnaire au travers le regard de ceux qui l’ont vécu dans leur chair comme dans leur sang...

Si on ne peut qu’être impressionné par le travail d’archiviste auquel s’est livré l’auteur pour tisser son récit, plus titanesque encore est celui qu’il a dû accomplir pour parvenir à illustrer son propos par des gravures d’époque ! Il serait d’ailleurs sans nul doute passionnant de connaître les coulisses de cet album, de savoir comment il a organisé ses multiples sources iconographiques pour écrire son histoire...

L’album s’achève sur une pertinente carte de Paris où figurent les lieux des principaux événements qui nous ont été relatés et sur une double page dense où figurent les références aux gravures utilisée pour faire ce présent album...

En résumé :

Raphaël Meyssan a consacré six années de sa vie pour lire, compulser et compiler de nombreuses archives, registres officiels, rapports de police, coupures de presse, comptes rendus de débats enflammés et témoignages authentiques pour tisser son histoire poignante, captivante et édifiante de la Commune de Paris... Le pari fou d’utiliser des gravures d’époque pour créer un album s’avère on ne peut plus réussi et contribue indéniablement à l’immersion dans cette époque de tous les possibles...

On ne peut que regretter que cette période troublée de notre histoire ne soit que rarement enseignée à l’école alors qu’elle illustre de façon saisissante les mots liberté, égalité et fraternité qui ornent le fronton de nos bâtiments officiels et que les communards ont écrit en lettre de sang...

À la recherche de Lavalette nous raconte les événements qui ont présidé à l’établissement de la Commune à hauteur d’homme... À la fin de ce premier tome, le peuple de Paris peut se croire maître de son destin... Mais on sait par avance que le dernier acte sera tragique...

(Lire la critique sur Les Damnés de la Commune de Raphaël Meyssan dans « Les Sentiers de l’imaginaire »)